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La matinée qui a suivi (samedi premier novembre, jour de la Toussaint donc) a été conforme à mes prévisions. J’ai été trimballé de cimetière en cimetière avec pour toutes distractions le remplissage d’une quantité astronomique d’arrosoirs et le bavardage incessant de la tante Maude. Regarde là-bas. Tu ne devineras jamais de quelle tombe il s’agit, mon petit Auréliounet, commençait-elle avant de m’entretenir avec passion sur de complets inconnus morts depuis belle lurette. Elle avait l’air de s’amuser autant qu’à Disneyland.

Moi, j’étais loin de partager son enthousiasme. J’avais fait des pieds et des mains pour rester dans la voiture, mais sans résultat satisfaisant. J’avais même essayé de trouver un compromis, proposant de finir les visites habillé d’une cagoule et une torche à la main, histoire d’amener un peu d’animation, mais ma chère maman m’avait simplement promis une claque si je continuais à déblatérer de telles idioties.

(Je précise avant d’aller plus loin que je ne suis pas de ceux qui cultivent la dérision, même si je n’ai encore que treize ans. Fleurir les tombes, je connais : je suis allé à l’enterrement de la mère d’une copine l’an dernier, peu après la rentrée, et quand j’y pense, j’en ai la gorge serrée, même encore maintenant. Simplement, j’avais dans cette situation précise, j’espère que vous me comprendrez, le sentiment d’une parfaite injustice.)

Nous avons terminé cette joyeuse expédition – retour à la case départ – par le cimetière de notre village. Vers une heure de l’après-midi, ma mère a remis un ultime semblant d’ordre dans un arrangement fatigué de chrysanthèmes en plastique et m’a ordonné de balayer la dalle. Elle a observé la minute réglementaire de silence en hommage à la chère disparue (1876-1934) puis a décrété que cela suffisait comme ça, et qu’il était temps de rentrer.

J’ai poussé un ouf de soulagement, même si la perspective de terminer l’après-midi à supporter la décoration intérieure du salon de la tante Maude n’avait rien de particulièrement réjouissant.

Je me suis enfui vers la sortie, posant au passage le balai près du robinet, et c’est à cet instant précis que mon destin a basculé.

Psst.

J’ai tiré la lourde grille de métal pour me glisser à l’extérieur. Le temps était sombre, comme s’il allait pleuvoir. Il ne manquait plus que ça ! C’était bien la peine de s’être éreinté toute la matinée à remplir ces fichus arrosoirs…

Psst.

Cette fois-ci, pas de doute, quelqu’un cherchait à attirer mon attention. Je me suis retourné et j’ai vu un type d’un certain âge qui me fixait.

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(C) 2015-16 Jérémie Cassiopée

Illustration: Marzena Pereida Piwowar

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